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Associations et fondations

LES FUSIONS ET APPORTS PARTIELS D’ACTIFS ENTRE ASSOCIATIONS

par 30 octobre 2025Aucun commentaire

Les rapprochements d’associations sont régis en France par la loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire, qui a introduit des dispositions spécifiques sur les fusions d’associations à l’article 9 bis de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association. Conformément à ces dispositions, deux mécanismes juridiques principaux peuvent être envisagés pour rapprocher deux associations : la fusion (par absorption ou par création d’une nouvelle structure) et l’apport partiel d’actifs.

La présente synthèse préparée par Maître Benoit HUET (Avocat associé) et Maître Margot RICHARD (Avocate collaboratrice) a vocation à présenter les principaux enjeux associés à ces deux mécanismes, afin d’éclairer les dirigeants associatifs dans le cadre des décisions stratégiques qu’ils sont amenés à prendre au moment du rapprochement avec une autre structure à but non lucratif.

I. Fusion d’associations

    La fusion est l’opération par laquelle une ou plusieurs associations transmettent l’universalité de leur patrimoine (actif et passif) à une association existante ou à une structure nouvelle, entraînant la dissolution sans liquidation des associations absorbées.

    Deux variantes sont possibles :

    • Fusion-absorption : une association absorbe les autres, qui lui transmettent leur patrimoine ;
    • Fusion-création : les associations concernées apportent l’universalité de leurs patrimoines à une nouvelle association, spécialement constituée à cet effet.

    Les principaux effets juridiques de la fusion sont :

    • La transmission universelle du patrimoine de l’association absorbée vers l’association absorbante (actifs, dettes, contrats, autorisations, agréments) ;
    • Le transfert automatique des membres des associations absorbées vers l’association bénéficiaire (art. 9 bis de la loi du 1er juillet 1901) : les membres deviennent de plein droit membres de la structure issue de la fusion ;

    La réalisation d’une fusion entre associations suppose notamment :

    • L’établissement d’un traité de fusion, arrêté par les organes dirigeants de chacune des associations concernées au moins deux mois avant les assemblées générales appelées à se prononcer sur l’opération (Art. D. 15-2 du décret 1901) ;
    • La réalisation de formalités de publicité, comprenant la publication du projet de fusion dans un journal d’annonces légales, au moins trente jours avant la tenue des assemblées générales. Cette publicité ouvre aux créanciers un droit d’opposition dans le même délai, selon les modalités prévues à l’article D. 15-5 du décret précité ;
    • La désignation d’un commissaire à la fusion, obligatoire lorsque la valeur totale des apports excède 1 550 000 € ;
    • L’approbation de la fusion par les assemblées générales des associations participantes, dans les conditions de majorité requises pour la dissolution (souvent à la majorité qualifiée, voire à l’unanimité en l’absence de disposition statutaire spécifique)

    La fusion entre plusieurs association est une opération qui présente les avantages suivants :

    • Unification complète des moyens, gouvernance unique, cohérence accrue ;
    • Transmission juridique et fiscale neutre (régime de faveur applicable).

    Les points de vigilance identifiés sont les suivants :

    • La fusion implique l’adhésion automatique des membres des associations fusionnées à l’entité commune, ce qui peut avoir des conséquences importantes sur la tenue des assemblées générales si les associations disposent d’un nombre d’adhérents très différents les unes des autres. Cette automaticité suppose d’anticiper la composition et la gouvernance de la future structure commune (création éventuelle de collèges, adaptation des statuts, etc.).
    • Il est nécessaire d’anticiper les délais nécessaires pour réunir les organes compétents pour approuver l’opération, et de recueillir l’accord des parties prenantes sur le projet statutaire commun.
    • Il faut enfin être vigilant sur le fait que la fusion entraîne le transfert, non seulement de l’actif mais aussi du passif de chaque association, ce qui implique de réaliser un audit préalable de chaque structure et d’identifier les risques dont le fait générateur est antérieur à l’opération mais qui pourront se matérialiser après la fusion (exemple : litige social, redressement fiscal, litige avec un fournisseur, etc.). Contrairement au droit des sociétés, il n’existe en en effet pas de « garantie d’actif et de passif » en droit des associations.

    II. Apport partiel d’actifs

      L’apport partiel d’actifs consiste à transférer une partie seulement de l’activité (branche complète d’activité) d’une association vers une autre, avec l’ensemble des moyens nécessaires à la poursuite de cette activité (contrats, ressources, droits, obligations).

      L’association apporteuse continue d’exister, elle n’est pas dissoute, et les membres de l’association apporteuse ne deviennent pas automatiquement membres de l’association bénéficiaire de l’apport, ce qui différencie l’apport partiel d’actif de la fusion. L’adhésion de tout ou partie des membres de l’association apporteuse à l’association bénéficiaire peut être traitée au cas par cas.

      D’un point de vue procédural, l’apport partiel d’actifs obéit aux mêmes exigences que la fusion, sous réserve des adaptations liées à son caractère partiel. Il implique notamment :

      • L’établissement d’un traité d’apport partiel d’actif, arrêté par les organes dirigeants des associations concernées au moins deux mois avant la date des délibérations appelées à statuer sur l’opération (article D. 15-2 du décret du 16 août 1901) ;
      • La réalisation de formalités de publicité, comprenant la publication du projet d’apport dans un journal d’annonces légales, au moins trente jours avant la tenue des assemblées générales. Cette publicité ouvre aux créanciers un droit d’opposition dans le même délai, selon les modalités prévues à l’article D. 15-5 du décret précité ;
      • La désignation d’un commissaire aux apports, obligatoire lorsque la valeur totale des apports excède 1 550 000 € ;
      • Une décision de l’organe compétent – conseil d’administration ou assemblée générale – des associations participantes selon les règles prévues par les statuts afin d’approuver l’opération d’apport partiel d’actifs.

      L’opération d’apport partiel d’actifs présente les avantages suivants :

      • L’apport partiel d’actifs permet d’éviter la contrainte de transmission automatique des membres et du corps électoral de l’association apporteuse vers l’association bénéficiaire de l’apport ;
      • Lorsque l’association apporteuse exerce plusieurs activités, l’apport partiel permet à cette association de poursuivre les activités qui ne sont pas transférées, en conservant son autonomie ;
      • Le transfert bénéficie du régime juridique et fiscal des fusions (article 9 bis de la loi de 1901 et article 210 A du CGI) sous réserve que l’apport porte bien sur une branche complète d’activité.

      Les points de vigilance sont les suivants :

      • Les activités transférées (personnel, conventions, autorisations) doivent être strictement listées dans le traité d’apport et doivent constituer une branche autonome d’activité ;
      • L’association apporteuse doit recevoir une « contrepartie morale suffisante » (poursuite de l’activité, maintien de l’affectation des biens, etc.).
      • Lorsque d’autres activités subsistent au sein de l’association apporteuse, elle doit veiller à conserver un équilibre économique et financier suffisant pour poursuivre son objet propre et assurer la continuité de ses missions. Il convient notamment à ce titre de déterminer si les éventuelles réserves financières de l’association suivent l’activité apportée et sont transférées à l’association bénéficiaire, ou si elles demeurent au sein de l’association apporteuse.

      III. Problématiques communes à la fusion et à l’apport partiel d’actifs

        La fusion ou l’apport partiel d’actifs entraîne plusieurs conséquences juridiques et pratiques qu’il convient d’anticiper afin d’assurer la continuité des activités et la sécurité de l’opération :

        1. Transfert des contrats de travail

        La fusion et l’apport partiel d’actifs entraînent le transfert vers le nouvel employeur de tous les contrats de travail en cours (uniquement ceux attachés à l’activité transmise pour l’apport partiel d’actifs) au jour de la réalisation de l’opération, en application de l’article L 1224-1 du Code du travail. 

        Il convient à ce titre d’être particulièrement vigilant sur l’identification précise des salariés concernés, notamment lorsque certaines fonctions (administratives, comptables, direction générale, etc.) sont mutualisées entre plusieurs activités. Une information et consultation préalable des représentants du personnel doit être organisée dans les structures d’au moins 50 salariés  (C. trav., art. L 2312-8 et L 2312-37).

        Enfin, il sera nécessaire d’assurer une harmonisation des régimes sociaux et salariaux au sein de l’association bénéficiaire, afin d’éviter des différences de traitement injustifiées entre salariés transférés et salariés déjà présents dans la structure d’accueil. Les associations parties à l’opération peuvent notamment parfois dépendre de conventions collectives différentes, induisant des différences de traitement.

        1. Transfert des contrats et engagements en cours

        L’opération emporte, par principe, le transfert de l’ensemble des contrats et engagements conclus par les associations participant à l’opération, au bénéfice de l’association absorbante ou bénéficiaire (transfert uniquement des contrats attachés à la branche d’activité transmise pour l’apport partiel d’actifs).

        Cela inclut notamment les contrats de bail, de prestation de services, de partenariat, de subvention ou de financement, ainsi que les contrats de marché public lorsque l’association agit en qualité d’adjudicataire ou de titulaire d’un tel marché (substitution de titulaire).

        Une vigilance particulière doit être apportée aux clauses d’intuitu personae ou aux stipulations subordonnant la transmission du contrat à l’accord du cocontractant, qui peuvent nécessiter des démarches spécifiques d’autorisation ou de renégociation préalables.

        1. Transfert des autorisations administratives, agréments, conventionnements ou habilitations

        Certaines activités associatives sont soumises à des autorisations administratives, agréments, conventionnements ou habilitations. La réalisation d’une opération de fusion ou d’apport partiel d’actifs suppose donc de s’assurer du transfert de telles autorisations, qui peuvent conditionner l’exercice de l’activité par l’association bénéficiaire.

        Il est à ce titre possible, et parfois indispensable, d’adresser une demande de rescrit administratif à l’autorité compétente qui se prononcera sur le transfert d’autorisation dans le cadre de l’opération envisagée (Loi 1901, art. L 9 bis, IV-al.1 à 3). Les demandes de transfert de ces autorisations doivent être anticipées et les demandes permettant de constater la réalisation de ces démarches doivent être jointes en annexe du traité de fusion ou d’apport partiel d’actifs.

        1. Publicité et information préalable

        La fusion, comme l’opération d’apport partiel d’actifs, sont des opérations complexes qui doivent être soigneusement anticipées, en raison notamment de certains délais processuels incompressibles.

        Dans les associations d’au moins 50 salariés, tout projet de restructuration doit faire l’objet d’une consultation préalable des institutions représentatives du personnel des associations concernées (C. trav., art. L 2312-8 et L 2312-37).

        Par ailleurs, les articles D. 15-3 et D. 15-4 du décret du 16 août 1901 imposent des mesures de publicité et d’information préalables :

        • Le projet de fusion ou d’apport partiel d’actifs doit être déposé au siège de chaque association participante au moins 30 jours avant la réunion de l’assemblée générale appelée à statuer sur l’opération, afin que les membres puissent en prendre connaissance.
        • Un avis de publication doit être inséré, à la diligence des associations concernées, dans un support habilité à recevoir les annonces légales, au moins 30 jours avant la date de la première assemblée appelée à statuer.

        Les créanciers non obligataires disposent d’un droit d’opposition dans un délai de 30 jours à compter de la publication (art. D. 15-5 du décret du 16 août 1901). En cas d’opposition, le transfert peut être suspendu ou subordonné à la constitution de garanties.

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        Afin de préparer, une opération de fusion ou d’apport partiel d’actif entre deux associations, il convient ainsi de mettre en place une méthodologie, permettant à la fois d’organiser chaque étape du projet, d’établir un calendrier tout en entamant une réflexion sur l’ensemble des éléments qui seront concernés par le regroupement.